http://lille.indymedia.org/article.php3?id_article=2639 (lien mort) (intermittents) explication du protocole d'accord 15 juillet 2003 Explication des mécanismes de calcul des indemnités Assedic des salariés intermittents du Spectacle, telles que prévues par le protocole d'accord signé par le MEDEF, la CFDT, la CFTC et la CGC dans la nuit du 26 au 27 juin 2003 à diffuser Comme vous pourrez le constater, les points 1), 2), 4) et 5) sont lourds de dangers, porteurs d'arbitraire et d'iniquités, inaptes à nous projeter dans l'avenir, et destructeurs de notre capacité à former des projets artistiques. 1) Pour ouvrir des droits, il faut avoir fait 507 heures en 10 mois (10 mois et demi pour les artistes). Qu'est-ce qui est compté dans ces 507 heures ? Les heures travaillées, mais uniquement dans le Spectacle. Les heures travaillées en "régime général" ne sont plus du tout comptabilisées ! (Dans l'actuel système, on avait la possibilité de faire 507 heures en cumulant : au moins 338h en régime Spectacle et 169h en régime général à condition d'avoir au moins 169h en Spectacle sur les trois derniers mois avant l'ouverture de droits. Ce ne serait plus possible, si le nouveau système est agréé par le gouvernement.) Premières victimes massives : les techniciens, dont certains employeurs n'ont pas le bon code NAF (ou APE), et dont les heures sont alors considérées comme "régime général", et les professionnels qui consacrent une part de leur temps à des activités d'enseignement. Les jours d'arrêt maladie ou congé maternité, à raison de 5h par jour indemnisé par la Sécu (au lieu de 5,6h actuellement) 2) "Ouverture de droits pour 8 mois (243 jours)". Le mécanisme est différent du système actuel : il n'y a pas de "date anniversaire" au bout de huit mois. Il n'y a plus de date anniversaire du tout. En fait, on ouvrirait des droits pour 243 journées d'indemnisation, sous forme d'un « crédit » de 243 jours indemnisables, qui pourront s'étaler sur une durée bien supérieure à 8 mois, jusqu'à ce que les 243 jours d'indemnités aient été effectivement « consommés ». Comme chaque mois, en fonction des emplois effectués dans le mois, les Assedic nous calculeraient un certain nombre de jours non indemnisés (le "décalage", voir ci-dessous pour le calcul), ça décalerait d'autant le jour de notre fin de droits. Les "8 mois" peuvent donc s'étirer sur 9, 10, 15 mois ou plus, selon la succession des contrats effectués. Et c'est lorsque nous percevrions notre 243ème jour d'Assedic, que notre situation serait réexaminée et qu'on réexaminerait notre dossier pour une éventuelle réouverture de droits. Pour cela, le jour où notre 243ème et dernier jour d'indemnité nous serait versé, l'Assedic regarderait combien d'heures ont été effectuées sur les 10 ou 10,5 mois précédents la fin du dernier contrat effectué... S'il y a eu 507 heures, un nouveau crédit de 243 journées lui est ouvert. Si on n'a pas trouvé 507 heures, l'Assedic regarde la situation depuis la fin de l'avant-dernier contrat de travail et cherche s'il y a eu 507 heures de travail sur les 10 mois ou 10,5 mois précédents (Les heures ayant déjà été comptabilisées pour une ouverture de droits précédente ne peuvent pas être utilisés une seconde fois). 3) Calcul du "taux", c'est-à-dire du montant de l'indemnité journalière. a - D'abord, au moment de l'ouverture des droits, l'Assedic calcule notre SAR (Salaire Annuel de Référence, égal au total des salaires perçus sur les 10 mois, abattus et plafonnés), puis notre SJR (Salaire Journalier de Référence), sensé correspondre à la moyenne des rémunérations par jour de travail durant les 10 mois (1/2) pris en compte pour l'ouverture de droits. Dans certains cas, le calcul est simple : SJR = SAR / Nbre de jours travaillés, mais dans d'autres cas, il peut être différent. Notamment, si en calculant SAR x 10 / Nbre d'heures travaillées, on trouve un résultat plus petit que comme précédemment, c'est le plus petit résultat qui est considéré comme le SJR. b - Calcul de l'indemnité journalière : on utilise la formule IJ = 19,5 % du SJR + Partie Fixe (environ 10 ¤) + 2,6 centimes par heure de travail sur les 10 mois (1/2). 4) Calcul du nombre de jours indemnisés au cours d'un mois. (Règle du « Décalage ») Le système change radicalement. Jusqu'à maintenant, on nous retenait en gros une journée d'Assedic pour une journée de travail (le calcul n'était pas si simple mais arrivait à peu près à ça). Si l'accord est agréé par le gouvernement, voici comment les choses se passeront : Chaque mois, les Assedic nous demanderont de déclarer la somme des SALAIRES que nous aurons perçus au cours du mois. Ils diviseront ce total de salaires par notre SJR, et ça leur donnera le nombre de jours d'indemnités à nous supprimer pour ce mois-là (jours de « décalage »). Exemple : Zoé. Elle a ouvert des droits le 1er octobre, sur la base d'un SJR de 100 ¤. Du 2 au 25 octobre, elle a un engagement et touche 3000 ¤ pour 150 heures de travail. Elle ne touchera qu'une journée d'Assedic en octobre car 3000 / 100 = 30 jours de décalage (dans un mois de 31 jours...) Du 1er au 30 novembre, elle fait 150 heures, pour 2000 ¤ : elle touchera 10 jours d'Assedic En décembre et janvier : rien, elle touchera chaque fois 31 jours d'Assedic. (fin janvier, ayant touché depuis son ouverture de droits 1 + 10 + 31 + 31 = 73 jours d'indemnités, il lui reste 243 - 73 = 170 jours indemnisables au titre de ses droits ouverts.) En février, elle tourne une pub, très bien payée : 3 jours (24 heures) pour 1800 ¤. Elle touchera 10 jours d'Assedic. Rebelote en mars, avec une autre pub. 24 heures déclarées, 1000 euros, 21 jours d'Assedic touchés. Avril, mai, juin, juillet, rien. Elle perçoit 30 + 31 + 30 + 31 = 122 jours d'indemnités perçus. (Il en reste 170 - 10 - 21 - 122 = 17 à percevoir. ) Août : elle travaille du 8 au 30, 130 heures pour 1800 ¤, et perçoit donc 12 journées d'Assedic (30 - 1800/100 = 12). Septembre, elle travaille tout le mois : 170 heures, pour 3200 ¤. Pas d'Assedic. Octobre, elle ne travaille pas et épuise ses droits le 4 octobre. On réexamine donc sa situation : depuis la fin de son dernier contrat, si on remontait douze mois en arrière, on trouverait 648 heures, mais voilà, on ne remonte que 10 mois en arrière, et elle n'a pas 507 heures, car les heures d'octobre et novembre de l'année précédente ne sont pas incluses. Fin de contrat précédent, le 30 août. Là non plus, les 10 mois précédant le 30 août ne permettent pas de trouver 507 heures. Et ainsi de suite. Le 5 octobre, Zoé se retrouve sans droits en ayant pourtant travaillé 648 heures en 12 mois. Exemple : Imaginons deux comédiens, U. et V. qui travaillent en mai sur le même film. Chacun a quatre cachets, et est payé autant : 300 ¤ par cachet, donc 1200 ¤ chacun. Seule différence entre eux : durant les mois précédant leur dernière ouverture de droits, U. faisait surtout du théâtre, avec de faibles cachets, et V. surtout du cinéma, avec de bons cachets. U. a un SJR de 50 ¤ et V. un SJR de 300 ¤. …/… Que va-t-il se passer à la fin du mois ? Les Assedic diront à U. : "Vous, vous êtes un pauvre, et 1200 ¤ correspondent à vos revenus sur 24 jours (car 1200 / 50 = 24) ; nous vous verserons donc 31 - 24 = 7 jours d'Assedic pour ce mois", alors que V. sera mieux considéré : "Cher M. V., votre train de vie est élevé, vous vivez à 300 ¤ par jour, nous allons donc vous retirer seulement 1200 / 300 = 4 jours d'Assedic pour ce mois-ci et vous percevrez 31 - 4 = 27 jours d'Assedic !" 5) La franchise (autrement appelée « carence ») Lors d'une ouverture de droits, l'Assedic calcule une « franchise », qui est un nombre de journées de chômage qui ne seront pas indemnisées. C'est lorsque la franchise sera épuisée que des périodes de chômage pourront être indemnisées. Travailler 10 jours pendant la période de franchise reculera de 10 jours le moment où l'on commencera à toucher des Assedic, au taux calculé au moment de l'ouverture de droits, et en respectant les calculs de « décalage » décrit au paragraphe 4). Le changement de calcul de la franchise par rapport à notre ancien système est spectaculaire : Alors que jusqu'à maintenant le calcul de la franchise tient compte à la fois de la masse de salaires perçus pendant l'année et de la moyenne de ces salaires par jour de travail, dans le protocole d'accord, il est prévu une franchise minimale, légèrement différente pour les techniciens et pour les artistes, et qui ne tient compte QUE du SJR, c'est-à-dire du niveau moyen de rémunération par jour de travail. Et ça donne par exemple ceci : Jusqu'à un SJR de 110 ¤ , pas de franchise du tout. Avec un SJR de 150 ¤ , 24 jours de franchise pour un artiste, 21 pour un technicien Avec un SJR de 200 ¤ , 66 jours de franchise pour un artiste, 62 pour un technicien Avec un SJR de 250 ¤ , 120 jours de franchise pour un artiste (4 mois, déjà !), 114 pour un technicien Avec un SJR de 300 ¤ , 187 jours de franchise (6 mois) pour un artiste, 177 pour un technicien Avec un SJR de 350 ¤ , : 265 jours de franchise pour un artiste, 252 pour un technicien, etc… Si la franchise était équitable dans notre système, elle ne l'est plus du tout dans celui-là : Le violoncelliste qui a fait 45 cachets de 300 ¤ sur 10 mois 1/2 (et a donc touché 13500 ¤, ce qui n'est pas beaucoup plus élevé que le SMIC mensuel), aura la même durée de franchise (6 mois) que le comique à succès qui a enchaîné 250 cachets de 300 ¤ et touché 75.000 ¤... Pour mémoire, dans les exemples ci-dessus, la franchise calculée selon le système actuel est de 30 jours pour le violoncelliste et de 170 jours pour le comique. Les « stars » extrêmement bien rémunérées peuvent actuellement avoir des durées de franchise qui durent jusqu'à leur date anniversaire et les empêchent totalement de toucher les Assedic. Ce ne serait plus le cas, puisqu'elles auraient les 243 jours à percevoir un jour ou l'autre... Vous aimez la loterie ? Voici une histoire qui va vous amuser : Exemple : Imaginons un duo (Pincemi et Pincemoi), qui fonctionne bien : ils travaillent toujours ensemble, perçoivent des salaires identiques, et leur carrière est rythmée par un festival annuel : Pendant le mois précédant le festival, ils répètent au SMIC horaire (1000 ¤ pour 26 cachets), puis jouent durant les 15 jours du festival pour un salaire de 60 ¤ par cachet, ce qui leur permet de tourner leur spectacle pendant le reste de l'année à raison d'un cachet de 400 ¤ par semaine. Seule différence entre les deux, la date de leur réouverture de droits en 2004 : Pincemi voit son dossier Assédic réexaminé juste avant de commencer les répétitions pour le festival, et Pincemoi juste après le festival. Pincemi aura fait 540 heures sur les 10 mois 1/2 précédents : 45 cachets à 400 ¤, ce qui correspond à un salaire total de 18.000 ¤, à diviser par 54 (c'est-à-dire 540/10) pour trouver son SJR : 333 ¤. L'Assédic calcule donc l'indemnité jounalière de Pincemi : 19,5% du SJR + 540 X 0.026 + PF, soit IJ = 89 ¤ par jour pour Pincemi, qu'il pourra toucher après... 245 jours de franchise (8 mois). Pincemoi, à sa date d'examen du dossier, aura fait 26 (répèts) + 15 (festival) + 39 (tournée)= 90 cachets sur les 10 mois 1/2 précédents (soit 1080 heures), pour un salaire total de 1000 + 15 X 60 + 39 X 400 = 17.500 ¤, d'où un SJR de : 17.500 / 108 = 162 ¤. Son Indemnité sera donc : IJ = 19,5% de 162 + 1080 X 0,026 + PF, ce qui donne 69,6 ¤ par jour pour Pincemoi, qu'il commencera à percevoir après... 40 jours de franchise. Pendant environ 9 mois, Pincemoi percevra en moyenne 1400 euros des Assedic alors que Pincemi ne percevra rien... Dans le système actuel, même avec des dates anniversaires différentes, Pincemi et Pincemoi auraient tout au plus quelques centimes de différence dans leur SJR et quelques francs de différence de revenus de leurs Assedic, et certainement aucune différence de franchise... Autres conséquences, plus politiques, à prévoir : le Medef ne manquera pas de présenter bientôt les artistes comme des "privilégiés" puisqu'ils ont 10 mois ET DEMI au lieu de 10 pour faire leurs heures, et de justifier ainsi une baisse de telle ou telle protection, puis de montrer ensuite du doigt les techniciens qui, eux, auraient encore le bénéfice de cette protection-là... Et ainsi de suite. Plus fondamentalement encore : on le sait, les "intermittents" subissent un droit dérogatoire accordé à leurs employeurs : celui de pouvoir nous embaucher en CDD aussi souvent qu'ils le souhaitent. Dans le régime général, au bout de 3 CDD, un salarié peut exiger de passer en CDI. Pas nous. Le système d'Assedic Spectacle que nous avions était différent du régime général pour tenir compte de notre totale fléxibilité. Or, le système que Medef et CFDT veulent nous imposer ne diffère presque plus du régime général, et notamment de celui des intérimaires. Il ne serait pas étonnant, dans les années qui viennent, de voir une campagne du style " Ces privilégiés du régime général, qui ont droit à un CDI au bout de 3 CDD, alors que les malheureux intermittents n'y ont même pas droit ! Abolissez les privilèges : rendez le CDD accessible à tous les employeurs de toutes les branches de l'industrie, sans limites !"... Soyons lucides et exigeons le retrait sans condition(s) de ce « protocole » ! ! ! ne pas jeter sur la voie publique- ne pas jeter sur la voie publique- ne pas jeter sur la voie publique Auteur: intermittents |