http://www.humanite.fr/journal/2003-10-07/2003-10-07-380178

Rencontres de l'ordre du devenir

Le 12 octobre, à l'initiative des États généraux de la culture animés par Jack Ralite, une rencontre inédite réunira créateurs et chercheurs pour débattre de la place de la culture dans la société.

Les propos de Jack Ralite, animateur des États généraux de la culture et à l'origine de la rencontre plurielle du 12 octobre, ne laissent planer aucun doute : il ne s'agit en aucun cas de consigner à cette occasion un cahier de doléances grandeur nature mais bien d'amorcer une réflexion sur le statut de l'esprit et de la création au sortir de la zone de turbulence qui a agité, cet été, le monde de la création. Dépasser le simple constat pour tenter d'échanger et d'élaborer des pistes de réflexions et des axes de travail qui remettent au goût du jour la pensée, l'intelligence, l'impertinence aussi, " élaborer un bouquet de pensées fortes ". Ce que Ralite résume en ces mots : " Rencontres de l'ordre du devenir. "

À écouter les brefs échanges entendus hier matin dans les studios de la Comédie-Française (1), Gérard Aschieri, secrétaire général de la FSU, tout comme Jean-Christophe Le Duigou ou Julie Brochen, présents à cette conférence de presse, abondent dans ce sens. Car au-delà de la seule question de la défense des annexes VIII et X, " le coup de tonnerre des intermittents " semble faire écho aux mouvements sociaux qui l'ont précédé, celui des enseignants ou des retraites. Or si ces mouvements ne se sont pas rencontrés, " ils se sont croisés " en des endroits inattendus, " posant le problème du statut de l'esprit, de la pensée et de l'imaginaire aujourd'hui agressé, fortement remis en cause ", comme le soulignait Jack Ralite.

Reprenant les propos de Boris Charmatz (dans l'Humanité du 6 octobre), l'animateur des états généraux faisait sienne l'idée qu'exprime le chorégraphe : " Les intermittents n'ont pas perdu, ils ont créé le débat. " Revenant sur les raisons de la rencontre inédite du 12 octobre, Ralite en spécifiait l'esprit et la lettre, rappelant qu'il était peut-être temps de " passer de la défensive à l'offensive " et " d'arrêter de penser en termes d'apocalypse car de belles choses se font ". Pour Jean-Christophe Le Duigou (CGT), " le dossier des intermittents n'est pas clos. Il oblige à franchir un saut qualitatif dans l'appréhension de la culture et de son rapport au travail : quelle finalité ? Quel rapport entre le travail et l'activité humaine ? La création peut nous aider à appréhender le travail et sa fonction d'émancipation ". Même questionnement chez Gérard Aschieri (FSU), pour qui, " le grand débat " souhaité par le gouvernement sur l'école ne peut faire l'impasse sur les fondamentaux que sont " les contenus, la formation et la finalité de l'enseignement ". Laissons le dernier mot à Michel Tubiana, président de la Ligue des droits de l'homme : " Le droit au bonheur figure dans le préambule de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. À ce titre, nous considérons la culture comme un droit. Dans un climat actuel où persiste une forte odeur d'ordre moral, il n'est pas étonnant que l'on s'attaque à la création. "

Z. L.

(1) Gérard Aschieri (FSU), Julie Brochen (metteur en scène, directrice de l'Aquarium), Judith Depaule (coordination des intermittents d'Île-de-France), Jean-Christophe le Duigou (CGT), Robert Guédiguian (cinéaste), Denis Podalydès (comédien), Olivier Py (directeur du CDN d'Orléans), Michel Tubiana (président de la Ligue des droits de l'homme), et Jean Voirin entouraient Jack Ralite. On notait dans la salle la présence de Marcel Bozonnet. Catherine Sammy, doyenne du Français, s'est excusée.


Article paru dans l'édition du 7 octobre 2003.