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Pour la reprise du conflit au niveau national, hier, ils sont allés interpeller le directeur régional des affaires culturelles

Dialogue de sourds aux Affaires culturelles
ANTOINE DE BAECKE

Aux alentours de midi, le cloître médiévalo-contemporain qui abrite les locaux de la Direction Régionale des Affaires Culturelles, ou DRAC, rue Magendie, avaient des airs de citadelle assiégée. Devant les lourdes portes d'acier, défendues par des vigiles retranchés à l'intérieur, les « gueux » de la culture (comme certains, d'après eux, sont tentés de les définir) cherchaient à se faire accorder une audience impromptue.
Ironiquement, les participants arboraient costumes, smokings ou robes du soir, arguant du fait qu'une manifestation « de droite » avait plus de chance d'aboutir. Il s'agissaient, par cette approche humoristique, de tenter de porter une parole très sérieuse auprès du représentant du ministre de la culture en région.
Celui-ci, Michel Berthod, arrivant au terme de son engagement de cinq ans à Bordeaux, ils avaient également tenu à lui porter un toast d'adieux au mousseux sans alcool, manoeuvre finalement occultée par la chaleur des débats, et à se recommander à son successeur.
Après avoir insisté pour être tous reçus (ils étaient 120 d'après les RG) aux cris de « pas de délégation, on est tous des patrons », ils eurent finalement gain de cause. La chose n'est pas sans importance dans le cadre d'un mouvement qui, du moins en Gironde, est une nébuleuse d'opinion qui, s'il bénéficie d'une coordination informelle, regroupe les professions et les positions les plus diverses et n'a pas à proprement parler d'organe de représentation exclusif. Les syndicats eux-mêmes, minoritaires par rapport à l'ensemble des intermittents aquitains, tenaient à ne pas être des interlocuteurs d'office.
Passés les premiers moments d'agacement de part et d'autre, le dialogue de sourd s'installait, modèle réduit de celui qui se tient (ou plutôt, si l'on en croit les intermittents en lutte, ne se tient pas) au niveau national. « Je n'ai pas de position personnelle, j'ai la position du ministre », tenait à rappeler le DRAC en préambule. Celui-ci s'exprimerait lui-même dans l'après-midi devant le CNPS, Conseil national des professions du spectacle, surtout pour exclure l'idée d'un moratoire sur l'accord du 27 juin, entériné le 7 août par le ministère des affaires sociales.
Face aux manifestants l'interpellant sur le thème « cette maison est la nôtre, elle n'existerait pas sans nous », Michel Berthod précisait à quelle hauteur : à 15 %, en pourcentage du nombre de salarié de la DRAC affectés au spectacle vivant.
Ces passes d'armes effectuées, on en venait au fond du débat, à savoir les graves incohérences relevées par les intermittents dans la réforme programmée de leur statut, en regard surtout des bénéfices annoncés comme attendus : la fin des abus auquel ce régime particulier de l'assurance chômage est propice, par exemple, et que le « plan social » du MEDEF, comme ils le qualifient, ne s'attache pas selon eux à résoudre.
En assemblée générale le 2 septembre dernier et le 9 septembre prochain à la Bourse du travail, les intermittents ont commencé à fourbir des arguments circonstanciés, avec lesquels, à la DRAC, ils se sont employés à percer quelques vessies histoire de ne pas avoir plus avant à les prendre pour des lanternes : l'augmentation de 1 E de la partie fixe de leur allocation, censée couvrir la diminution de 30 % de la part flottante; ou encore le fameux seuil des 507 heures de cachets déclarés dont ils doivent justifier pour bénéficier du régime d'allocations en dix mois d'activité au choix dans l'année écoulée, au lieu de douze précédemment, mais de date à date. Un progrès, selon le ministère et son représentant. L'inverse, selon les concernés.
Mais au delà des formes de l'assurance-chômage des professions du spectacle, c'est une question beaucoup plus vaste qui émergeait constamment au cours des débats, lesquels empruntaient à des contentieux anciens et classiques comme celui des modalités de subvention des entreprises artistiques : celle du financement de la culture et de l'importance de celle-ci au sein de notre société. Une donnée dont les gens du spectacle ont parfois l'impression qu'il leur reste à en convaincre leur propre ministère de tutelle.

« Je n'ai pas de position personnelle, j'ai la position du ministre », a rappelé le DRAC