1 -  un témoin suisse...froid dans le dos.

Cyril Mallefer acteur, metteur en scène, intervenant au département de clinique psychanalytique de l’association Le Chiffre de la parole à Lausanne (Suisse).

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A propos des controverses

Michel Simonot a parlé de la finalisation des dispositifs. Mais n’y a-t-il pas une finalisation du signifiant ? En tentant de décrire une situation n’avons-nous pas la tendance d’y coller des signifiants qui la juge et en font une caricature sujette à la polémique. N’est-ce pas une finalisation du signifiant où,, croyant avoir évoqué un concept, nous en faisons un objet, du réel, de la substance ?

La parole n’est pas la polémique est les meilleures choses de ces controverses étaient les témoignages : un récit, un itinéraire, de la difficulté, de l’obstacle comme occasion et occurrence.

En Suisse, là où je tente l’aventure du théâtre, il n’y a pas de subventions pour les théâtres indépendants, il y a seulement des subventions pour quatre troupes en " contrat de confiance " sur cinq années et quelques miettes pour deux théâtre de créations lausannois. La Suisse romande, francophone est culturellement la province de la province. Pourtant le théâtre de Vidy a un budget qui avoisine les 50 millions de FF, l’opéra de Lausanne 80 millions FF. Telle est la situation. Les troupes indépendantes se tourne vers les mécènes privés submergés de demandes. Il n’y a pas de statut d’intermittent, le délai de chômage est de 10 mois, il est dégressif selon le nombre de contrats déjà obtenus. Je ne veux pas m’étaler plus longtemps sur ces disparités et pleurnicher mais dans notre cage dorée, désertée par l’art et la culture, tombe le plus grand nombre de jeunes suicidés d’Europe. (15-20 ans)

A Avignon j’ai vu un théâtre vivant et vivifiant, une manifestation de grande ampleur et des controverses. Lieu de parole, relation avec le public, avec la vie. Il y a aussi un souffle chez les jeunes créateurs qui n’ont pas le goût de la revendication mais créent tous azimuts.

L’artiste ou l’auteur doit-il s’inventer artiste de son financement ? Dans la difficulté ne pourrait-il pas élaborer des questions et des arguments, non pour réclamer sa pitance à l’état (en échange de son silence ?) mais pour convaincre des financiers que la culture permet à la population un plus grand essor, une meilleure consommation, une meilleure santé, une plus grande productivité d’actes et d’idées. Que deviendraient les télécommunications quand les gens ne sauront plus se parler ? Les " Télécom " n’ont-ils pas tout intérêt à promouvoir le théâtre ?

La libéralisation est aussi l’occasion de trouver des partenaires financiers hors la tutelle protectrice de l’état. N’est-ce pas l’occasion de grandir pour les artistes et les auteurs hors du sein maternel de l’état ? Encore faut-il le faire, j’y consens, et vous promets de vous tenir au courant.

Un mot que je n’ai pas beaucoup entendu est celui de l’écoute. Il faut l’écoute pour qu’il y ait l’infini de la parole, la liberté d’aller plus loin. Ce matin, en voyant le pont d’Avignon, je me suis dit : " il faut faire le pas plus long que la jambe. "

Cyril Maillefer
Acteur – metteur en scène – auteur ?

2 - "le courrier" , un point de vue suisse

... Les musiciens genevois, réclament surtout un statut digne de ce nom, qui leur permette non seulement de ne plus avoir à justifier «ce qu'ils font dans la vie... à part la musique», mais aussi de pouvoir bénéficier des prestations de chômage pour sortir de la précarité. Car aujourd'hui encore, la dure réalité est que le musicien n'existe pas vraiment. En ligne de mire, bien sûr, le fameux statut d'intermittent du spectacle de nos voisins français. Il est ardemment souhaité par les musiciens suisses; une pétition a même été lancée sur internet2. Mais les politiques, eux, dévient en touche: il ne suffit pas d'attendre que la solution vienne d'en haut, répond en substance Pierre Roerich, représentant du Département des Affaires culturelles de la Ville de Genève. Et d'inciter les artistes à se constituer en lobby pour faire pression sur les autorités, notamment au niveau fédéral. Sur ce thème, comme sur celui des locaux, le manque de volonté politique aura été pointé par tous les participants. Car d'un autre côté, le foisonnement des musiques actuelles est indéniable. Le succès de la Fête de la musique genevoise en témoigne, avec plus de 600 concerts l'an dernier. Mais le musicien reste encore le «dindon de la farce», si l'on compare ses cachets aux salaires des techniciens. Ainsi, si la formation fonctionne, avec des lieux d'apprentissage comme l'ETM (Ecole de technologie musicale), l'AMR pour le jazz et les nombreuses scènes pour se faire la main, la suite du parcours, en revanche, est encore celui du combattant.
Roderic Mounir