Communiqué de la commission OGM d'Attac

 septembre 2003

concernant la culture en plein champ d'OGM à but thérapeutique

suite à une destruction de maïs près d'Issoire


Attac qui s'est publiquement engagé contre la dissémination des plantes OGM et conteste résolument la levée du moratoire Européen,  ne s'oppose pas, par principe, à la recherche génétique à fin thérapeutique. Il est possible que ces techniques apportent dans un avenir lointain des avantages appréciables dans le traitement de certaines maladies. En revanche, en l'état de nos connaissances, tout nous amène à refuser formellement la culture des Plantes Génétiquement Modifiées en plein champ, quelle que soit leur destination.


En ce qui concerne les plantes insecticides ou résistantes aux herbicides, qui représentent près de 98 % des cultures, nous disposons aujourd'hui d'éléments probants qui indiquent qu'elles n'apportent aucun avantage pour les consommateurs. Il ne s'agit, dans le meilleur des cas, que d'une amélioration de la rentabilité (avantages qui de surcroît reviennent essentiellement aux semenciers) au prix d'une pollution planétaire, de la disparition des plantes améliorées naturellement et de risques sanitaires non maîtrisés. Avec l'assurance d'appauvrir et d'affamer un peu plus les paysans des pays les moins développés.


En ce qui concerne les plantes thérapeutiques, les avantages hypothétiques, directement liés au traitement des maladies, ne doivent pas servir de prétexte à leur dissémination non contrôlée dans la nature. Utiliser la détresse des familles pour introduire insidieusement ces plantes en l'absence de toute précaution est un procédé inqualifiable. En l'état de nos connaissances, rien ne permet de sortir ces recherches des laboratoires. On peut comparer ce problème à la recherche de certaines molécules concernant des maladies comme le Sida. Il existera toujours des malades, compte tenu de leur état désespéré, prêts à prendre tous les risques pour tester ces nouveautés avant leur mise au point finale. Mais ces risques ne concernent que leur personne.


Il n'en va pas de même pour les OGM, thérapeutiques ou non. Les allégations prétendant que les caractères introduits ne pouvaient pas se diffuser dans la nature ont été de nombreuses fois démenties par les faits. Les résistances ou les toxicités ajoutées à la plante ne diffusent pas seulement par le pollen mais par les graines oubliées dans les champs, dispersées par le vent ou les petits animaux, mélangées pendant les transports. Elles se répandent et gagnent insensiblement du terrain. De telle sorte que l'on constate aujourd'hui que le maïs Mexicain, à l'origine des variétés cultivées, est lui-même contaminé. Peut-on accepter sans rien dire que quelques entrepreneurs pressés mettent l'humanité devant le fait accompli ? Il est opposé également la non toxicité avérée des OGM. Affirmation qui n'a aucun fondement scientifique dans la mesure où il n'existe pas de recherche sérieuse dans ce domaine. Pire, trois des quatre laboratoires français de toxicologie, seuls organismes susceptibles d'étudier les conséquences des OGM sur l'environnement et la santé, ont été fermés ces deux dernières années.

 

D'autre part si, comme cela est avancé dans cette expérience, nombre de plantes OGM sont stériles et ne peuvent donc pas se croiser avec d'autres, on ignore complètement les effets qu'elles pourraient avoir sur les bactéries du sol et les insectes. Lâcher dans la nature ces chimères dont on ne connaît rien scientifiquement (croisement du gène d'un chien et d'un épi de maïs) paraît être un geste irresponsable. Et surtout, un précédent qui ouvre la voie à une science folle. Le laboratoire qui a lancé la culture expérimentale prétend respecter un certain nombre de précautions. Or, les seuils et les normes définis le sont par lui ou ses pairs selon des hypothèses non vérifiées. Prendrait-on les mêmes risques avec une plante à très forte toxicité? Certainement pas. Or, pour être certain de l'absence de toxicité de ces plantes expérimentales, il manque un facteur essentiel : celui du temps. D'autant plus difficile à définir que l'on ne sait pas s'il faut appliquer des valeurs proches du mois, de l'année ou du siècle. Ce facteur semble hélas incompatible avec les impératifs du retour sur investissements.


Afin de ramener les évènements d'Issoire à leur juste proportion, nous rappelons que la mucoviscidose reste une maladie que l'on ne sait pas guérir. Les thérapies connues ne servent qu'à soulager (ce qui est un progrès non négligeable) la vie des patients, le plus souvent très jeunes. Il n'est donc pas question d'un élément de traitement mais d'un palliatif des symptômes digestifs. Ce maïs ne produit que l'une des enzymes nécessaires à leurs soins quotidiens. Enzyme qui, jusqu'à présent est extraite du pancréas du porc. Il ne s'agit en aucun cas d'un médicament nouveau susceptible de guérir des malades mais d'une autre méthode de production d'un produit largement utilisé. L'argument prétendant que cela permet de supprimer les risques de contamination par un virus ne tient pas puisque la filière animale est maintenue pour les autres produits. La perspective de fabriquer cette enzyme à moindre coût (ce qui n'est pas à négliger connaissant le trou de la Sécu), ne doit pas faire renoncer à la vigilance et au respect des précautions les plus élémentaires. Mais, s'agirait-il d'une molécule révolutionnaire que cela ne changerait rien à l'affaire. ça ne justifierait pas pour autant que l'on prenne le risque de la lâcher dans la nature. Nous pourrions payer à terme ces économies au prix fort.

 

Il est curieux que cette campagne visiblement orchestrée, ne mentionne pas les autres possibilités ou filières possibles, bien plus sûres pour l'environnement. La plus simple étant la culture sous serres sécurisées. Des milliers d'hectares en France sont actuellement inoccupés. La plus prometteuse consiste à mettre au point la production du médicament à partir de suspensions cellulaires, en incubateurs confinés

 

Nous regrettons par conséquent qu'un certain nombre de citoyens aient été contraints, pour faire cesser une manouvre consistant à nous mettre devant le fait accompli et à imposer un processus irréversible, de se livrer à des actes considérés comme délictueux. Mais nous regrettons plus encore que des laboratoires se servent de l'indignation de familles dans la détresse pour faire avancer leurs projets économiques. Il serait désolant que ce qui ressemble fort à une campagne de désinformation devienne une stratégie commerciale destinée à faire adopter des produits auxquels la population est opposée massivement.

 

Encore une fois, ce n'est pas la nature des OGM semés en plein champ qui détermine nos positions. Ils n'y ont pas encore leur place et leur dissémination est largement prématurée. Le principe de précaution (renforcé par la récente mise en application du protocole de Carthagène) impose qu'ils continuent, autant que cela sera nécessaire, à faire l'objet de recherches approfondies dans des laboratoires confinés et sécurisés. En souhaitant que ces travaux, fortement soutenus par une puissante industrie, ne soient pas le seul axe de recherche en accaparant toutes les énergies et tous les financements.

 

Commission OGM d'Attac

 

Oui à une recherche scientifique respectueuse de l'environnement.

En gardant les OGM dans laboratoires !