CULTURE EN BOÎTE.

Jadis, en 2003, le bon peuple Français, fier de sa terre d’asile et de
son beau palais
Au fronton ciselé de belles lettres sculptées qui parlaient, il me semble,
entre autres d’égalité,
S’imaginait encore avec naïveté que le sol qu’il foulait était celui,
Messires, gentes dames et puis beaux damoiseaux,
D’une démocratie bien solide et intègre.
Après tout, ce bon peuple, somme toute, n’avait pas tort.
Le bon roi Jacques Premier avait été élu par un beau mois de mai,
À 80 des suffrages exprimés.
La cour de ce bon roi était fort agitée.
Les coffres de l’état, personne ne comprenait, avaient besoin, Messires,
De se voir renfloués.
Mais où donc, s’il vous plaît, pouvait-on bien trouver
La rente substantielle permettant de donner aux dames,
Aux beaux seigneurs et puis aux chevaliers
Enfin à notre élite du royaume de France,
Le lustre qui manquait tant à sa magnificence.
Pouvoir jouter enfin, se mettre en concurrence
Avec l’Empire U.S. et sa belle arrogance.
Diantre, on ne pouvait pas, car c’était insensé,
En ces temps de violence et d’insécurité,
Désarmer nos soldats, les faire aller à pieds,
Nous n’avions déjà plus et depuis trop d’années
De centrales nucléaires, de bombes, de grenadiers.
Nos casernes en déroute faisaient alors pitié.
Dassault, désespéré, courait à sa ruine
Il criait, presque nu, hagard, désemparé,
Il était aux abois, allant jusqu’à solder, tel Tati,
En Afrique, et jusques en Asie,
Ses mines tellement pâlottes, ses missiles anémiés,
Ses chars d’assaut exsangues, les F15 de sa flotte,
L’archiduchesse Alliot s’en était inquiétée
Et d’une main de fer allait tout redresser.
Mais il faudrait du temps et surtout des deniers.
Nous ne pouvions non plus aller dévaliser le portefeuille
Tout plat de nos chers policiers,
Les rues n’étaient pas sûres
La canaille éructait son rejet du bon droit
Les gueux étaient partout dans les cages d’escaliers
Il fallait bien un flic au cul de chaque français.
Le Vicomte Nicolas allait y remédier.
Nous avions bien pensé délester un petit
Les caisses de la justice et les pénitenciers
Quelques suicides de plus dans les prisons bondées
Étaient un moindre mal.
Mais si, au fil du temps comme il était souhaité,
Nous réservions le droit à la scolarité à nos héritiers seuls
Dignes de cette charge, il fallait bien prévoir
Car c’était gouverner, quelques cages solides
Où loger le rebut et les déshérités
Cela coûtait fort cher et la peine de mort restait impopulaire.
Alors comment pallier une bonne fois et pour toutes
Ce grand manque à gagner.
Renoncer aux cocktails et à nos jets privés,
À tous nos privilèges, à notre immunité ?
Que Nenni ! Monseigneur Raffarin, il était Cardinal,
S’en alla pactiser avec Antoine Sellières, Baron de son état.
Celui-ci fut très bref, il mit un point de plus sur le “i” du profit.
Celui, qui sans nul doute, cruellement lui manquait :
“Les Français sont feinéants, qu’ils retournent bosser,
À la mine s’il le faut !
-Seigneur, elles sont fermées depuis belle lurette !
-Ne me fatiguez pas, taillez dans les retraites
Deux trois ans, et basta !
Allez voir Luc Ferry et décentralisez !
Son prénom n’est pas Jules, que je sache ?
Comment peut-il penser à un lycée pour tous, gratuit et bien géré ?
Cela suffira-t-il ?
_ Bon Prince, je ne sais...
_Alors rajoutez-moi aux listes précitées quelques médicaments
À ne plus rembourser !
Depuis quand la racaille prétend-elle se soigner ?
À La Salpêtrière, à Bichat, La Pitié, il y a bien trop de lits,
Beaucoup trop d’infirmiers, trop d’air conditionné, trop de vieux !
Faites les circuler, allez voir Matteï, il saura négocier.
Le trou de la Sécu a bien assez duré.
Quelques grands trusts, je sais, n’ont jamais cotisé
Ce n’est pas mon problème, je parle, obéissez !
Il faudra, je le pense aussi envisager quelques licenciements
Et d’autres salariés : cette main d’oeuvre est trop chère
Dites aux dirigeants d’aller voir en Corée, s’ils ont trop de Scrupules,
Qu’ils s’offrent à mes frais quelques prostituées.
L’argent n’a pas d’odeur, sauf celle, s’il vous plaît,
Que mes amis et moi, voulons bien lui donner.
Et c’est encore trop peu ? (un temps)
Notre exception Française, je crois, a la santé.
Que font tous ces artistes de leurs indemnités ?
D’abord, il y en a trop, ils sont trop bien payés
Moi, je roule en Clio, je ne fais pas de frais.
Que font-ils dites-vous ? Ils chantent, ils jouent, ils créent ?
C’est pas rentable ça ?
Est-ce que ces saltimbanques ont besoin de manger ?
L’art doit être ascétisme, douleur et pauvreté.
Ils ont même des enfants, ils dorment, ils ont une âme,
Ils ressentent le froid, le chaud et les sarcasmes ?
Ce sont des gens comme nous ? Envoyez leur l’huissier !
Qu’il y mette bon ordre, allez donc voir Jean-Jacques,
Dites-lui “c’est assez” !
Le pain de la culture est assez nourricier.
Leur permettre de vivre, et avec dignité,
Enfin les protéger de la précarité ?
Le baron Aillagon saura se contenter de gérer l’audimat des shows
Télévisés, les grandes eaux de Versailles et leurs jolies Fusées avec des
spots partout ! Quelqu’un doit les monter ?
Les techniciens aussi, vous dites, se sentent lésés ?
Ca suffit, circulez, Jean-Jacques avisera
Je ne veux désormais que du dur, du concret, du rentable,
La star académie produira sans compter des artistes de choix
Qui nous feront danser. La culture est un luxe !
La populariser ? Mais vous n’y pensez pas !
Du théâtre pour tous et puis de la beauté,
De Lille jusqu’à Toulouse, en passant par Sarcelles ?
C’est la révolution que vous me souhaitez ?
Que le peuple d’en bas, donc la majorité, reste où on l’a placé
Dans la crasse, le bourbier, à sa place !

Voilà en 2003, ce qui est arrivé
La moitié des artistes a cessé d’exister
À la place des théâtres, il y a des cabarets
Mais pas de ceux où l’on peut voir des chansonniers.
Des cabarets qui sentent 33, Berlin, les bottes cloutées
Des cabarets virtuels sur des écrans télé, où contre quelques sous, ou
Quelques gros billets, Star Ac, Pop Star, le Loft, nous étaient proposés.
En place de la culture, nous avons inventé, le ministère “Show Biz”.
Nous l’avions bien cherché.

J’VOUDRAIS TRAVAILLER ENCORE, TRAVAILLER ENCORE...
OU LE CRI DE L’INTERMITTENTE MINABLE.


COMÉDIENNE, ÂGE MÛR, 40 ANS PASSÉS, MÉDAILLE D’OR À
L’UNANIMITÉ DICTION, COMÉDIE CLASSIQUE, COMÉDIE
MODERNE CONSERVATOIRE MUNICIPAL D’ART DRAMATIQUE DE
CULOZ, PHYSIQUE QUELCONQUE, MÊME PAS LAIDE,
MENSURATIONS INEXPLOITABLES, 95, 100, 130, TEINT
BROUILLÉ, CHEVEUX GRAS, PUANT DE LA GUEULE, QUASIMENT
INCULTE ET ANALPHABÈTE, MAIS TRAVAILLEUSE ET HONNÊTE,
INCAPABLE DE CHANTER, DANSER, NAGER, MONTER À CHEVAL,
MANIER L’ÉPÉE OU LE SABRE, PRÊTE CEPENDANT À SE TIRER
UNE VRAIE BALLE DANS LE PIED MAIS EN UNE PRISE
SEULEMENT PARCE QUE çA FAIT MAL, OU EN DEUX PRISES MAIS
C’EST TOUT ET DANS L’AUTRE PIED, ELLE EN A DEUX, DE PIEDS,
AUSSI ÉLÉGANTE ET GRÂCIEUSE QU’UNE TORTUE DE MER
AVANT LA PONTE, DÉNUÉE DE CHARISME, DOUÉE COMME
PERSONNE POUR VOUS POURRIR UNE AMBIANCE EN MOINS DE
TEMPS QU’IL N’EN FAUT À MADONNA POUR ENVOYER SA PETITE
CULOTTE À LA TÊTE DE CHIRAC, SANTÉ FRAGILE, AUCUNE
ÉNERGIE, TOXICOMANE ET ALCOOLIQUE, LANGUE DE PUTE ET
CARACTÈRE DE MERDE COMPLÈTEMENT IMPRÉVISIBLE, SANS LA
MOINDRE IMAGINATION, INCAPABLE DE S’ADAPTER MAIS
OBÉISSANTE ET MALÉABLE, FAIT Où ON LUI DIT DE FAIRE,
SERVILE ET FAUX CUL, PRÊTE À TOUT POUR ARRIVER,
MARCHERAIT SUR LE VENTRE DE SA MÈRE POUR SERRER LA
MAIN D’UNE STAR, N’ÉTANT NI LA FEMME, NI LA FILLE, NI LA
COUSINE DE SILVIO BERLUSCONI OU JEAN-MARIE MESSIER,
CHERCHE RÔLE, TÉLÉ, CINÉMA, THÉÂTRE, ÉTUDIE TOUTES
PROPOSITIONS SÉRIEUSES, N’ACCEPTE LES SCÈNES DE SEXE QUE
SI ELLES SONT ESSENTIELLES AU SCÉNARIO OU À LA
DRAMATURGIE...

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Anne-Marie Puy